VAN ZANT: Always Look Up (2024)
Attention, les âmes sensibles sont priées de quitter la salle !
Bien entendu, les propos qui vont suivre n’engagent que leur auteur mais ça risque de faire mal.
Le rock sudiste est à l’agonie !
Oh, il ne mourra sans doute jamais tout à fait mais il restera dans la clandestinité. Ce genre musical n’est plus d’actualité. Mais la musique en général est-elle encore d’actualité ? On est en droit de se poser cette question car les réseaux sociaux et les jeux vidéo sont devenus la principale source de distraction pour échapper au quotidien, reléguant les disques et les concerts à l’arrière-plan. D’ailleurs, le langage des jeunes générations est sans appel. On ne dit plus « on écoute de la musique » mais « on passe du son ». Une nuance énorme !
Mais alors, que deviennent les musiciens ?
Ils se débrouillent comme ils peuvent selon leur notoriété et certains s’en sortent encore bien. Mais ce n’est pas la grosse majorité. Pour la plupart, il s’agit plus de survie qu’autre chose.
Et le rock sudiste ne fait pas exception. On peut faire un parallèle avec le rockabilly dans les années 80. Quelques vieilles stars sortent de leur retraite le temps d’un concert exceptionnel ou d’un festival et partagent la scène avec des artistes ayant percé une quinzaine d’années auparavant et qui rallient les fans de ce style musical. Ajoutons des petits nouveaux n’apportant pas grand-chose et dont on sait qu’ils n’iront pas bien loin. Et tout ce petit monde tente de gagner un peu de sous tant qu’il en est encore temps, ce qui est bien naturel.
En ce qui concerne le rock sudiste, il faut regarder la vérité en face. C’est la fin de la grande époque (depuis le temps qu’on nous l’annonce) et ce « Always look up » en est la preuve flagrante. Cette production (relativement correcte au demeurant) annonce la pente descendante qui entraînera doucement le rock sudiste vers la confidentialité, comme pour toutes les musiques « typées » (qui écoute encore du western swing par exemple?).
Nos idoles ne devraient pas vieillir mais partir en pleine gloire.
Ce qui va suivre n’est pas un manque de respect mais simplement de la lucidité.
Lynyrd Skynyrd s’endort doucement et ne se réveillera que pour quelques shows en pilotage automatique afin de palper des billets verts. Et encore, ce n’est pas certain. Sans Gary Rossington, difficile de raviver la légende.
En fin renard qu’il est, Rickey Medlocke a bien senti le vent tourner. Malheureusement, il reforme un Blackfoot rabougri et maladif. D’ailleurs, Mister Rattlesnake n’affiche pas une forme éblouissante. Les derniers concerts le montrent grossi, poussif et avare de solos (le groupe ne joue que la partie lente de « Highway song »). Il a dû mettre pas mal d’argent de côté pour pouvoir sortir un album dans le contexte actuel mais on a du mal à reconnaître sa voix si particulière. Comme le disait mon grand-père « quand l’âge est là, il est là ! ». Johnny Van Zant ferait bien de faire attention à sa santé car on a l’impression qu’il dissimule une citrouille sous son T-shirt. Quant à son frère Donnie, on sait très bien qu’il ne retournera pas dans son groupe d’origine en raison de ses problèmes d’oreille. Car s’il peut encore enregistrer en studio, pour faire de la scène c’est une autre histoire. 38 Special ne sortira sans doute jamais un nouvel album (avec tout le respect qui lui est dû, quelle maison de disques signerait le groupe de nos jours?). Le combo de Don Barnes est donc condamné à tourner jusqu’à la fin mais Donnie ne peut plus s’exposer à la puissance sonore inévitable lors d’un concert. Alors, que faire ? Tout simplement revenir à la bonne vieille formule qui a fonctionné par le passé. Les frangins du rock sudiste ! Deux pour le prix d’un ! Et pour garantir un maximum de ventes, autant taper au cœur même d’une partie de l’Amérique profonde en dédiant ce nouveau disque à Dieu. Même si beaucoup de musiciens sudistes sont très croyants, ça va faire jaser dans les chaumières. Pour tout dire, cette démarche n’est pas tellement dérangeante. La musique a toujours été un business comme un autre. Les Van Zant veulent engranger pour leur retraite, il n’y a rien de plus normal. Aux States, on assure ses vieux jours à la sueur de son front, à la force de son poignet ou de… son pied de micro. Mais au final, qu’est-ce que ça donne ? Un album dans l’air du temps. Un disque qui se veut consensuel en essayant de toucher un maximum de fans de rock au sens large. Une production qui a le cul entre deux chaises. Pas vraiment rock sudiste, pas vraiment country-rock. Sûr, c’est de la musique américaine. Si on met de côté les paroles, ça se laisse gentiment écouter en fond sonore, en bagnole ou pendant un apéro entre potes. Mais ceux qui veulent des six-cordes débridées ou des chevauchées dans les grands espaces, ceux-là seront un peu déçus.
Bon, il y a quand même pas mal de titres mélodiques (« Awesome God », « Stand up ») et une très belle ballade (« It’s up to you », certainement la meilleure chanson de l’album). Cependant, on n’a droit qu’à de courts solos (qui sont plus des phrases de guitare que des solos à proprement parler). Par moments, on peine à reconnaître les voix de Johnny et Donnie (et pourtant leurs voix, on les connaît). Et puis, il y a un morceau un peu lourdingue, sans doute hérité de la version actuelle de Lynyrd Skynyrd (« Jesus Christ »). Pas trop terrible ! Dans l’ensemble, ce disque manque de piment. Les titres se succèdent sans engendrer beaucoup d’émotions et tout finit par se ressembler. Mais c’est toujours mieux que la musique bidon distillée à la radio, à la télé et sur le net. En conclusion, personne n’est obligé d’acheter et chacun fera comme il veut. Ronnie Van Zant reconnaîtra les siens !
Amen !
Olivier Aubry
VAN ZANT: Always Look Up (2024)
Nouvel album pour les frères Van Zant, qu’on ne présente plus ici, dans un style musical complètement différent : le rock chrétien. Que l’on apprécie ou pas, que l’on fasse abstraction des paroles ou pas, il convient de se concentrer sur la musique et le son de cet album, qui est un mélange de sonorités sudistes (légèrement), country et gospel, même si les ballades prennent le dessus. Les trois premiers titres « Awesome God » « Stand up » et « Warrior » sont très sympas à écouter, dans l’esprit de ce que les frangins ont déjà produit, avec cette texture sudiste cool, accélérant vers la fin.
Attention ! Pas de trio de guitares ni de cavalcades effrénées de six- cordes, même si Mark Matejka et autres comparses viennent donner un coup de main, mais cela reste très agréable à écouter. Les autres morceaux qui retiennent l’écoute sont « Speak his name » teinté de gospel, chœurs et claviers, et « Jesus Christ » à l’intro lourde et qui monte en puissance; le reste n’est pas mauvais mais est surtout dans le registre « ballades », certes magnifiées par les voix des deux Van Zant et par les orchestrations ciselées, mais pour peu que l’on soit « allergique » aux paroles (ou que l’on n’y adhère pas forcement) elles peuvent assez vite lasser l’auditeur ! Les anciens comme moi se rappelleront certainement du groupe Vision, au sein duquel officiaient Billy Powell et Leon Wilkinson, et qui était, à l’époque, catalogué par beaucoup comme un « groupe chrétien sudiste » et que Ronnie n’a jamais nié sa foi. Alors il faut, je pense, écouter cet album dans le respect des croyances des deux Van Zant.
Chris MARQUIS